Sclérose en plaques : des médicaments qui réparent la myéline

La sclérose en plaques est une maladie auto-immune du système nerveux central, c’est-à-dire le cerveau et la moelle épinière. Elle évolue très lentement et handicape la vie quotidienne 15 à 20 ans après le début des premiers symptômes.

Les différents acteurs de l’immunité patrouillent en permanence l’organisme à la recherche des envahisseurs et des cellules cancéreuses. Une fois leur proie repérée, ils agissent de concert pour l’éliminer le plus vite possible, avant qu’elle n’altère les organes. Cependant, dans certains cas, le système immunitaire peut engendrer l’effet inverse et se retourner contre les tissus qu’il est censé protéger. Ainsi, au lieu de défendre le corps contre les agents infectieux, il attaque les tissus sains, entraînant l’apparition d’une maladie auto-immune comme le lupus ou la sclérose en plaques. Ces maladies sont souvent déclenchées à la suite du dysfonctionnement des lymphocytes T régulateurs, des cellules immunitaires qui régulent l’action de certains lymphocytes T tueurs et maintiennent en place l’équilibre fragile entre protection et auto-immunité.

Chez les personnes touchées par la sclérose en plaques, qui sont plus de deux millions dans le monde selon l’Inserm, certains lymphocytes T détruisent la myéline des neurones, une gaine lipidique qui les protège et améliore la vitesse de circulation des informations nerveuses. À terme, cela entraîne un ralentissement des messages nerveux et déclenche différents symptômes tels qu’une faiblesse musculaire, de la fatigue et des pertes de mémoire. Malheureusement, il n’existe pas encore de thérapie miracle contre cette maladie qui ronge les neurones petit à petit.

Une nouvelle classe de lymphocytes T régulateurs

De nombreux scientifiques travaillent avec ardeur pour mieux comprendre l’origine et le développement de la sclérose en plaques et pour vaincre cette pathologie pernicieuse. Récemment, plusieurs équipes se sont démarquées sur le sujet. L’une d’elles a identifié des molécules capables de réparer la myéline alors que l’autre a dépisté une cible thérapeutique parfaite pour bloquer son développement chez la souris. Cependant, ces travaux n’en sont qu’au statut de tests et les recherches continuent. Une nouvelle étude prometteuse vient de voir le jour dans la revue Nature Medicine. Des chercheurs de l’université de Copenhague (Danemark) ont en effet détecté une nouvelle catégorie de lymphocytes T régulateurs capables de combattre les globules blancs hyperactifs destructeurs de myéline. Chez la souris, leur stimulation permet de diminuer l’inflammation cérébrale qui a lieu lors de la sclérose en plaques.

« Nous pensions déjà que certaines cellules immunitaires pouvaient bloquer la destruction de la myéline qui apparaît lors de la sclérose en plaques, explique Yawei Liu, le principal auteur de l’étude. Mais nous ignorions lesquelles. » Pour le savoir, les chercheurs ont comparé les populations de lymphocytes présentes dans le système nerveux central de souris atteintes d’une inflammation cérébrale associée ou non à une démyélinisation. Chez les rongeurs possédant une myéline saine, ils ont identifié une nouvelle population de lymphocytes T régulateurs. En analysant en détail ces cellules, ils ont montré qu’elles exprimaient FoxA1, un gène dont la fonction était jusqu’ici inconnue.
FoxA1, le gène qui active les lymphocytes T régulateurs

Quel est le rôle joué par FoxA1 ?

Par des techniques de biologie moléculaire et de biochimie, les chercheurs ont montré que ce gène induisait l’activation d’une cascade moléculaire transformant les lymphocytes T régulateurs en machines tueuses de lymphocytes destructeurs de myéline. En forçant l’expression de ce gène, ils ont d’ailleurs réussi à diminuer l’inflammation cérébrale chez la souris. Pour finir, les scientifiques ont examiné des échantillons sanguins de personnes touchées par la sclérose en plaques, avant et après un traitement de deux ans avec des interférons bêta, des médicaments utilisés comme immunomodulateur. Ils ont alors découvert que ce traitement augmentait le nombre de lymphocytes T régulateurs exprimant FoxA1, expliquant ainsi son action thérapeutique.

« Nos résultats ouvrent la voie vers de nouveaux traitements contre la sclérose en plaques, raconte Shohreh Issazadeh-Navikas, la directrice de l’étude. Chez la souris, nous avons réussi à activer ces nouveaux lymphocytes T régulateurs par des méthodes génétiques et chimiques. Qu’en sera-t-il chez l’Homme ? » Dans le futur, l’équipe souhaiterait répondre à cette question.
Elle voudrait également évaluer le rôle des globules blancs identifiés dans le développement d’autres maladies auto-immunes, le diabète de type 1 par exemple.

© grid-france.fr | Tous Droits Réservés